Novembre 2021. Le naufrage d’un bateau de migrants dans la Manche cause la mort d’une vingtaine de personnes à la limite des eux territoriales. Malgré les appels à l’aide, les secours britanniques et français ne sont pas venus.

Inspiré de ce fait réel, le roman de Vincent Delecroix, œuvre de pure fiction, pose la question du mal et celle de la responsabilité, en imaginant le portrait d’une opératrice du CROSS qui, elle aussi, aura peut-être fait naufrage cette nuit-là.

Le roman, scindé en trois parties, retrace tour à tour l’interrogatoire de la jeune femme par une capitaine de gendarmerie, la traversée funeste des clandestins, et enfin les pensées perdues de l’accusée bien après le drame.

La littérature permet de donner un visage et une chair à toutes ces figures.

Personne ne sera sauvé. Mais le naufrage n’avait-t-il pas commencé dès que ces gens, venues du Kurdistan, d’Afrique subsaharienne ou d’ailleurs, avaient dû quitter leur maison, monnayer leurs passages depuis leur pays d’origine et confier leur vie à des passeurs sans scrupules ? Et l’opératrice n’est-elle pas une responsable trop facilement désignée, alors qu’elle n’est qu’une maille d’une longue dérive humanitaire ?

Naufrage pose un regard sur les dysfonctionnements de notre monde et interroge sur la responsabilité collective derrière la responsabilité individuelle.

Vincent Delecroix propose un roman qui veut ne pas laisser indifférent dans le contexte actuel. Son écriture clinique et désincarnée, qui veut retracer la dureté du monde et de ses protagonistes, peine hélas à entraîner le lecteur. Le moteur littéraire cale à plusieurs reprises, comme celui de ses personnages. Et comme lui, il peine à atteindre son but.  

CC(R) Jean-Pascal DANNAUD
17/11/2023

Vincent Delecroix
Naufrage
Gallimard – 17 août 2023