Au cœur de l’océan. La véritable histoire de Moby Dick

Moby Dick ! Qui d’entre nous n’a croisé dans son enfance ce cétacé célébrissime ? considéré dans la littérature ou la musique comme un monstre démoniaque, mais dont les écologistes d’aujourd’hui se bousculeraient pour prendre la défense ? Toutefois, ce n’est pas sur un ton frivole ou dramatique que Nathaniel Philbrick aborde ce sujet, mais sur celui, beaucoup plus sérieux et mesuré, de l’historien. Car, figurez-vous, l’histoire de Moby Dick n’est pas une invention littéraire, mais l’évocation d’un fait bien réel.

     Nous sommes le 12 août 1819. Le baleinier Essex quitte l’île de Nantucket (Massachusetts) sous le commandement du capitaine George Pollard, pour une campagne de chasse de la baleine, prévue pour durer deux à trois ans. Mais, le 20 novembre 1820, une double collision avec un gigantesque cachalot a raison du bordé du navire et envoie celui-ci par le fond. Répartis dans trois embarcations, les vingt officiers et marins vont s’efforcer de rejoindre la lointaine côte de l’Amérique du sud avec des fortunes diverses : certains mourront et seront immergés, d’autres seront dévorés par leurs camarades affamés. En fin de compte, il n’y aura au total que huit survivants. L’un d’entre eux, Owen Chase, ancien second de l’Essex, rédigera après coup un récit des évènements que son fils communiquera à l’écrivain Herman Melville, lequel en tirera, sous une forme romancée, l’ouvrage mondialement connu.

     Toutefois, une autre relation du drame existait ; écrite par le garçon de cabine Thomas Nickerson, âgé de quatorze ans lors de l’appareillage, elle resta inconnue jusqu’en 1960. Nathaniel Philbrick s’est abondamment servi de cette source de premier plan, dont la maladresse est gage de spontanéité, et d’autant plus précieuse que Nickerson tenait la barre de l’Essex lors de la collision fatale. Se référant également à de nombreux documents d’archives, cités dans les notes en fin de volume, il commence par évoquer la vie à Nantucket, haut-lieu de la pêche baleinière au cours de la première moitié du XIXème siècle, et la rude existence de ses habitants, avec des campagnes durant, en général, deux ou trois ans et dont les épouses de marins se consolaient parfois en recourant à l’opium (p. 54). Puis il retrace le voyage de l’Essex, d’abord relativement heureux, jusqu’à l’incroyable tragédie. Embarqué à bord du canot du second capitaine Owen Chase, (qui, en raison d’une incompréhensible prévention à l’égard de la Polynésie française, préférera se lancer dans une navigation hasardeuse vers l’Amérique du Sud, beaucoup plus éloignée), Nickerson décrit cette terrible épreuve : 4.825 kilomètres parcourus en 89 jours, durant lesquels il aura vu mourir trois de ses compagnons et dû, ainsi que les deux autres, subsister en se nourrissant du cadavre du dernier mort.                                                                                    

     Dans l’ensemble, il s’agit d’un ouvrage très intéressant, qui relate avec une foule de détails ce drame de la mer. La traduction paraît être des plus fidèles et quelques illustrations, bien choisies quoique trop peu nombreuses, viennent rehausser la qualité de ce livre dont on ne peut que recommander la lecture à tous ceux qu’intéressent les histoires (parfois tragiques) de navires et de marins.

CV(H) Philippe HENRAT
01/03/2025

Au cœur de l’océan. La véritable histoire de Moby Dick
Nathaniel PHILBRICK
Paulsen

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