Fortune de mer de la Compagnie des Indes

Dans la nuit du 2 au 3 décembre 1746, alors qu’il n’est plus qu’à quelques miles de Lorient son port d’attache, le Prince de Conty, navire de la Compagnie des Indes, se brise sur les rochers de la pointe sud de Belle-Île-en-Mer. Il faisait partie d’une escadre de trois navires, qui avait appareillé de Lorient en avril 1745 à destination de la Chine. Cinq mois plus tard, le Philibert, l’Aimable et le Prince de Conty étaient à Canton, où ils chargèrent thé, soieries, porcelaines, ainsi que quelques lingots d’or. 

Dans cet ouvrage, édité simultanément avec l’ouverture de l’exposition éponyme au musée de la Compagnie des Indes de Port Louis, les auteurs détaillent les principaux aspects de ce voyage.

Brigitte Nicolas – conservatrice du Musée de la Compagnie des Indes, s’intéresse à la route suivie par l’escadre et aux conditions dans lesquelles s’effectua ce voyage long et périlleux, en pleine guerre de Succession d’Autriche lorsque la France était en lutte contre l’Angleterre et les Pays-Bas.  Partie de Lorient, l’escadre fait une première escale au Cap Vert, avant de longer les côtes du Brésil, puis de doubler le Cap de Bonne Espérance, de traverser l’Océan Indien, de passer les détroits de Malacca et de la Sonde avant d’atteindre l’Ile de Wampoa près de Canton. Au retour elle passe le détroit de Florès – une route inhabituelle – fait escale à l’Île de France, puis à l’Île Bourbon, double le Cap de Bonne Espérance où les trois navires se perdent de vue dans la tempête. L’Aimable et le Prince de Conty se rejoignent sur la côte brésilienne où ils subissent une attaque de corsaires anglais dont ils sortent vainqueurs. Les trois vaisseaux se regroupent à la Grenade, qu’ils quittent en convoi avec d’autres vaisseaux, sous les ordres de La Galissonnière. L’atterrage sur Belle Ile se fera par une forte tempête, que le Philibert et l’Aimable surmonteront miraculeusement, alors que le Prince de Conty ira à la cote.

Michel L’Hour, ancien directeur du DRASSM – Département des recherches archéologiques subaquatiques et sous -marines – s’intéresse au bâtiment et à sa construction à l’arsenal de la Compagnie à Lorient, à son chargement et aux campagnes de fouilles de l’épave. Dès 1747 la Compagnie des Indes organise une opération où seront récupérés des caisses de thé, des balles de cafés, des morceaux de soieries… mais point d’or. En 1974 des plongeurs amateurs obtiennent une autorisation de fouilles qui tournent rapidement au pillage et au saccage du site pour mettre la main sur l’or. Ce n’est qu’en 1985 qu’une étude archéologique est organisée par le DRASSM sous la direction de Michel L’Hour. Une grande quantité de porcelaine de Chine datant de l’empereur Qianlong (1736-1795), des restes de caisses de thé et trois petits lingots d’or chinois seront dégagés de l’épave. Une partie de ces objets est présentée dans l’exposition de Port-Louis. Mais en 2018, 5 lingots d’or chinois réapparaissent dans une vente aux enchères aux Etats Unis. Le DRASSM en fait le signalement et l’enquête permet de confondre les vendeurs. L’affaire passera en jugement au tribunal de Brest courant 2025.

Michel L’Hour a également rédigé un chapitre concernant l’évolution de la législation relative à la propriété des épaves et les droits des inventeurs. Beaucoup d’épaves présentent un intérêt archéologique ou historique qui doit être protégé.  Aujourd’hui une épave est considérée comme un bien culturel maritime protégé par l’Etat. Toute recherche est soumise à autorisation et toute découverte doit être déclarée.  L’inventeur n’a plus droit au tiers de la valeur des biens sauvés, mais à une récompense déterminée par l’intérêt scientifique de la découverte et dont le montant ne peut dépasser 30 000 Euros dans le cas d’un intérêt exceptionnel.

En conclusion, voici un ouvrage de petit format, richement illustré, très documenté sur les plans historique et juridique, passionnant à lire.

CV(H) Gérald BONNIER
18/08/2024

Fortune de mer de la Compagnie des Indes
L’escadre de Chine et le naufrage du Prince de Conty
Brigitte Nicolas – Michel L’Hour Editions Ouest France – Musée de la Compagnie des Indes

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