Mondialisation du Pacifique

Il est un aspect que l’on occulte généralement lorsqu’on évoque le partage du monde entre Portugais et Espagnols (les Castillans du livre) au 16ème siècle : c’est la concurrence féroce, violente, que se livrèrent, sur les flots, les deux royaumes ibériques. C’est tout particulièrement en Asie que se heurtèrent les deux ambitions hégémoniques : les Moluques, et juste à côté les Philippines. Lorsque les expéditions espagnoles, arrivant par le détroit de Magellan, butèrent – enfin ! – sur ces archipels, les Portugais, déjà présents, les repoussèrent sans merci, jusqu’à ce que le Traité de Saragosse concède les Philippines, récemment découvertes (mais pas les autres îles) aux Castillans.

Dès lors comment, sans affronter les Portugais, retourner en Espagne et y rapatrier les richesses trouvées dans la région : les épices avant tout, mais aussi les soieries et les porcelaines échangées avec les marchands chinois contre l’argent métal ? Tout simplement en retraversant, cap à l’est, le vaste océan (la Mar del Sur) en direction de la Nouvelle-Espagne (le Mexique d’aujourd’hui), que venait de conquérir et explorer Hernan Cortez. Là les marchandises peuvent rejoindre le Golfe du Mexique et l’Atlantique au travers de l’isthme de Tahuantepec et repartir de Vera Cruz vers Cadix. C’est cela la « Route du retour » (le Tornaviaje) du sous-titre du livre.

Après avoir rappelé les conditions de la circumnavigation de Magellan, l’auteur décrit avec beaucoup de précision la recherche d’une route sûre pour mettre en route le « Galion de Manille », entre Manille et Acapulco. Les conditions de navigation sont effroyables, entre les avaries et les naufrages, la navigation hasardeuse (le point, les cartes … approximatives), le manque d’eau et de vivres en l’absence d’escales et de ravitaillement (quatre mois de traversée), et les maladies (le scorbut, bien sûr). Après plusieurs échecs, la route finit par se mettre en place à partir de 1565 (donc postérieurement à la période étudiée), elle profite des courants – Kuro Shivo puis Nord-Pacifique – et un peu des alizés.

Deux à trois convois de galions par an seront par la suite organisés. Cela va durer jusqu’à l’indépendance du Mexique en 1815.

Cet excellent livre fourmille de détails et de références bibliographiques, c’est comme cela qu’il faut le lire … en se munissant d’une grande carte du Pacifique et des archipels asiatiques : c’est là en effet la principale lacune de ce petit livre (150 pages), les deux ou trois illustrations en fin d’ouvrage sont très insuffisantes.

L’auteur est un marin, un capitaine au long cours avec une grande expérience maritime. Au fait, le nom de l’éditeur : Zéraq. Ça ne vous rappelle rien ? Le Zéro à Quatre, bien sûr. Zéraq est une maison d’édition qui s’est spécialisée dans les récits de mer.

CV(H) Jean FOSSATI
08/12/2023

Mondialisation du Pacifique
La découverte de la route du retour
Mikaël Rémond
Editions du Zéraq

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