Toulon au fil des textes
- Auteur CV(H) Philippe HENRAT
- Publié dans Livres
- Permalink
Ce livre a reçu le Prix Marine Bravo Zulu 2022 dans la catégorie « Mention spéciale Livre ».
Aaah ! Voilà vraiment LE livre idéal pour les vacances ! Plutôt que de se plonger avec plus ou moins d’enthousiasme dans les interminables et filandreux méandres du dernier prix *** (ne vexons personne), ouvrons plutôt ce petit volume aussi intéressant qu’intelligemment conçu. Certes, diront les éternels ronchons, il ne s’agit QUE d’un recueil de textes, mais en sélectionner d’aussi parfaitement adaptés au sujet que l’on souhaite traiter, tout en les assortissant d’un commentaire aussi intelligent qu’attrayant, est une tâche probablement plus difficile et plus hasardeuse que de laisser libre cours à son imagination.
Marc Bayle, ancien commissaire de la Marine, devenu ultérieurement préfet, s’est, bien que natif du Ponant, pris de passion pour la ville de Toulon. Son recueil de textes, choisis avec érudition et éclectisme, de Vauban à Georges Blond en passant par Victor Hugo, Stendhal, George Sand, Pierre Loti et Claude Farrère (bien sûr), Jean Aicard, (cela va sans dire), Francis Carco, voire Gilbert Bécaud et Daniel Herrero, peut être lu à discrétion, texte après texte ou en papillonnant d’un thème à un autre. Dans l’ensemble, l’ouvrage évoque quatre thèmes majeurs : Toulon, « ville martiale », Toulon, « ce monde émerveillé qui rit et qui s’interpelle », Toulon, « ville de la douceur de vivre » et enfin Toulon, « chaudron politique ».
Certes aucun éloge ne se conçoit sans un reproche, mais lequel adresser à un tel ouvrage ? Peut-être un peu trop d’insistance sur la prétendue « légende noire » de Toulon, répandue aussi bien par Arthur Schopenhauer que par Victor Hugo (étrange tandem, soit dit en passant) ? Non, même pas, car il renvoie aux contextes historiques les récriminations de l’un comme de l’autre. C’est vrai, Toulon fut le siège d’un bagne, mais tel fut auparavant le cas de Marseille, puis celui de Brest et de Rochefort que nul ne couvrit jamais d’opprobre pour cette raison. Il est tout aussi exact que les royalistes locaux appelèrent à l’aide la flotte anglaise de l’amiral Hood en 1793 avant de l’accompagner à bord de l’escadre du contre-amiral de Trogoff de Kerlessy , mais, là encore, Marc Bayle fait justice (p. 55-56) de cette « image d’Épinal », en retraçant brièvement les luttes acharnées et meurtrières entre Royalistes et Jacobins, qui donnèrent surtout l’occasion de se faire connaître à un petit officier corse au nom bizarre.
En fait, il préfère à juste titre s’étendre sur le rayonnement nouveau de ce port, lié peut-être trop longtemps et trop exclusivement à la Royale.
C’est ainsi qu’il cite, parmi les nouveaux atouts de la vieille cité (ou plutôt de la nouvelle métropole Toulon-Provence-Méditerranée, qui s’étend désormais de Six-Fours jusqu’à Hyères), l’énorme bassin d’emploi qu’elle représente, son développement dans le tertiaire supérieur, l’émergence de technologies de pointe, dont le meilleur exemple est l’entreprise Naval Group. Enfin, il ne manque pas de vanter le plaisir de flâner dans une ville au climat doux, au hasard de quartiers pétris d’histoire, mais au charme discret, bien loin de l’agitation mondaine et souvent frelatée d’autres localités provençales.
Bref, si vous ne connaissez encore de Toulon qu’une chanson célèbre (et malveillante), le moment est opportun pour la découvrir : Marc Bayle vous en ouvre les portes à deux battants.
CV(H) Philippe HENRAT
10/07/2022
Toulon au fil des textes
Marc BAYLE
Editions Capit Muscas
Voir également la recension de Bertrand GALIMARD FLAVIGNY et la recension du CF(H) Philippe BEAUCHESNE