Les femmes et la mer à l’époque moderne
- Written by Invités du comité de lecture de l’ACORAM
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Classer cet ouvrage académique dans le domaine de l’histoire semble réducteur. En effet, les deux chercheurs Emmanuelle Charpentier et Philippe Hrodéj, traitent avec un intérêt certain les domaines sociologiques, philosophiques, économiques, psychologiques du monde ouvert sur la mer sans barrière ni tabous auxquels peu d’ouvrages sont consacrés.
Au travers des 265 pages, ce livre nous fait voyager de siècle en siècle, depuis le 16ème jusqu’à l’époque moderne. Cinq siècles de références mais aussi de comparaisons qui donnent au lecteur initié le désir de poursuivre la lecture. Cet ouvrage dont les références locales, régionales, nationales sont d’une retranscription exemplaire nous conduit, au fil des chapitres, à une analyse européenne sans frontières terrestres.
La mer -maître mot de l’œuvre- se conjugue avec la vie et les conditions des femmes. Les dernières citées n’ont pas de frontières, elles sont du Levant et du Ponant, des Provinces-Unies/Pays Bas, Espagnols jusqu’aux Iles Shetland.
Ces femmes ont contribué à être des « relais entre la vie en mer et la vie à terre, relais des autorités, relais avec la religion ».
Elles ne sont pas que femmes de marins. Elles deviennent communautés agissantes dans l’intérêt d’un port ou d’une cité. Elles sont ouvrières, femmes de négociants, d’officiers ou appartenant à la noblesse. Elles sont aussi miséreuses.
Ce livre ne nous laisse pas indifférent lorsque l’on sait qu’elles sont aussi sur les navires de guerre ou de commerce, et leur place en ces siècles est loin s’être acquise. Pour l’illustrer les deux chercheurs ont puisé dans l’histoire avec le voyage entrepris par Flora Tristan « le voyage transatlantique : éveil d’une conscience sociale ». Il plonge le lecteur dans un récit romantique où la prise de conscience d’une fraternité universelle se dessine. Flora Tristan femme des Lumières, sera la première qui par son escale au Cap Vert, a osé s’insurger contre l’esclavage. La mer sera aussi symbole de liberté dans les écrits poétiques de Pouchkine (Invocation de la mer 1824) de Byron ou de Napoléon. Joseph Vernet (18eme siècle) ouvrira la tradition des Peintres de la Marine. Il tentera par son œuvre à faire infléchir certaines décisions royales. Au fil des chapitres, d’autres noms illustres seront présentés suscitant les envies de poursuivre la lecture parfois ardue pour les non-initiés.
Pour conclure, ce remarquable travail de recherche que l’on pourrait presque qualifier de thèse, demeure un socle de références passionnantes pour ou lectrice ou lecteur féru(e) des grandeurs et misères de la mer. Il ne peut hélas capter l’intérêt des tous les lecteurs, mais c’est presque un travail de mémoire !
CC(RCit) Martine MICHEL-DEBERGHES
Invitée du comité de lecture
25/04/2019
LES FEMMES ET LA MER A L’EPOQUE MODERNE
E. Charpentier et P. Hrodéj
Presses universitaires de Rennes