James Cook, le compas et la fleur

Le Prix Marine & Océans 2015 catégorie « Livres » a été décerné à Anne Pons pour James Cook, le compas et la fleur.

Ou, peut-être, « James Cook, le voyage de trop ? ». Cet ouvrage, écrit par la journaliste, romancière et biographe Anne Pons, couvre les trois voyages de découverte entrepris par James Cook entre 1767 et 1779 et sa mort aux mains des Hawaïens dont il était le premier Européen à avoir vu et cartographié les îles qu’il nomma « Sandwich », du nom du Premier Lord de l’Amirauté, son supérieur, commanditaire et protecteur.

Le XVIIIe siècle, « Siècle des Lumières », vit l’aboutissement dans toute l’Europe occidentale d’un mouvement de pensée séculaire, humaniste, scientifique et progressiste, celui des philosophes et « encyclopédistes », développé dans divers cercles cosmopolites, notamment maçonniques, qui, avant sa fin, produisit l’indépendance des Colonies américaines et la Révolution française. Malgré les relations conflictuelles entre Nations, ce mouvement de pensée les surpassa et, sans surprise, les Marines les plus puissantes, portugaise, espagnole, hollandaise, anglaise et française, furent impliquées au premier chef dans les découvertes scientifiques et géographiques qui participaient au progrès général des connaissances. Bougainville, Cook et Lapérouse, tout en servant militairement leurs pays et leurs rois respectifs, parfois l’un contre l’autre, comme Bougainville et Cook lors de la fin du Canada français, eurent un parcours similaire, suivant les mêmes routes, à la recherche de terres jusque là inconnues et avec le but ultime de découvrir l’hypothétique « Terra Australis » qui occupait les esprits et aussi le « passage du Nord-Ouest » entre les océans atlantique et pacifique dont on attendait de grands profits commerciaux.

Cook, contrairement à ses « concurrents » français, n’était pas issu du sérail aristocratique des officiers de marine mais, fils d’un valet de ferme, il dut sa carrière à ses qualités de cartographe et de marin apprises sur « le tas ». Leur point commun géographique fut leur passage à Tahiti où ils eurent plus ou moins de succès à faire cadrer leurs observations avec le mythe philosophique du « bon sauvage ». Après 2 voyages de 3 ans chacun où James Cook mena ses recherches selon les strictes consignes reçues et commanda de façon sévère mais humaine en prenant soin tant de ses équipages que des populations aborigènes rencontrées, le découvreur insista pour commander lui-même le 3e voyage que tant le Roi George III, que l’Amirauté et la Royal Society voulaient lui épargner considérant qu’il avait déjà assez peiné pour son pays et pour la science. Ce fut le voyage de trop : à près de 50 ans, la fatigue, la maladie et les sautes d’humeur le minaient et menaçaient ses missions et les hommes qu’il commandait. N’ayant trouvé ni la Terra Australis ni  un passage du Nord-Ouest praticable, c’est finalement sur un malentendu et une incompréhension mutuelle des traditions et interdits religieux d’une peuplade polynésienne qu’il était le premier Européen à avoir découverte qu’il trouva une fin atroce avec quelques uns de ses hommes sur une plage d’Hawaï, sous le regard impuissant du reste de ses équipages.

Anne Pons souligne parfaitement que, malgré une dégradation physique et mentale progressive, James Cook laissa une œuvre cartographique immense pour un seul homme de son siècle et fit avancer les connaissances dans de nombreux domaines. Il n’est pas de pays où il ait atterri qui ne possède une ou plusieurs statues à la gloire de ce grand navigateur et de ce grand homme, même si ce fut, comme il ne pouvait en être autrement à l’époque, au prix cornélien de délaisser sa famille qui pesa moins pour lui que son devoir.

C.F. (H) J.M. CHOFFEL
08/11/2015

 

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